Паметна битка на народите
Бистра Цветкова

 

BATAILLE MEMORABLE DES PEUPLES

(Le Sud-Est européen et la conquête ottomane — fin du XIVe — première moitié du XVe siècle)

 

(Résumé)

 

 

La bataille près de Varna le 10 novembre 1444 est un moment crucial de la lutte de près d'un siècle menée par les peuples balkaniques contre l'expansion osmanlie. La défaite des forces chrétiennes unies constitue le dénouement de graves événements remplissant l'histoire du Sud-Est européen au cours des dernières décennies du XIVe et les premières décades du XVe siècle. Plus d'un investigateur s'est penché sur cette dramatique page de l'histoire. Les deux-campagnes de Ladislas III Jagellon et de Jean Hunyade (1443—1444) ont fait l'objet de nombreuses études dans la littérature scientifique.

 

Or, jusqu'à présent, ces événements n'ont jamais été examinés sur un vaste plan historique tant par l'historiographie bulgare qu'étrangères. Les campagnes et la bataille près de Varna sont en quelque sorte isolées des grands problèmes de l'époque précédant la prise de Constantinople et dans laquelle se détachent quelques points importants: la lutte des pays balkaniques contre les Osmanlis, l'établissement de la domination ottomane dans ces pays, les traits caractéristiques des institutions ottomanes de cette époque et l'attitude des peuples asservis envers elles, les forces politiques européennes et le danger ottoman, le plus important essai des puissances européennes d'arrêter l'expansion ottomane et d'empêcher la consolidation des Osmanlis en Europe — les deux campagnes de Ladislas III Jagellon et de Jean Hunyade.

 

Le présent ouvrage a pour but d'élucider l'ensemble de tous ces problèmes en analysant d'une manière critique toutes les sources et toutes les études concernant ces événements. C'est précisément sur le fond de ces problèmes fondamentaux du Sud-Est européen, posés au cours d'une époque troublée et critique, que l'on pourra élucider, de manière équitable et nette, le sens et l'importance de la bataille près de Varna.

 

Le premier chapitre du livre contient une analyse de la littérature sur les grands problèmes de cette période de l'histoire du Sud-Est européen ainsi qu'un apperçu détaillé sur les sources historiques concernant ces problèmes.

 

Le deuxième chapitre élucide l'état intérieur des pays balkaniques ainsi que les essais de résistance anti-ottomane de différents milieux de la société balkanique. Comme à l'époque de leurs premières conquêtes en Anatolie les Osmanlis se heurtent aussi dans les Balkans à une réalité sociale et à une structure politique qui les encouragent à poursuivre leur expansion. Cette expansion leur apporte de nouvelles acquisitions territoriales que l'Etat ottoman répartit parmi les chefs des «uc» en voie de féodalisation ainsi que parmi les simples combattants — les gazis et les alps, dont le zèle est recompensé par de lots de terre. A l'instar de l'Anatolie les Osmanlis .trouvent dans le Sud-Est européen une société dont les différentes classes et couches ont des intérêts et des aspirations bien différentes et même contradictoires. Ils y trouvent aussi des souverains en luttes mutuelles pour des avantages territoriaux insignifiants, dans lesquelles ils n'hésitent pas de recourir à l'aide des Osmanlis même. Les conquérants trouvent ici aussi une quantité de seigneurs presque indépendants et de gouverneurs locaux, nommés par les premières chroniques ottomanes «tekfur», c'est-à-dire «gouverneurs des infidèles».

 

Tous ces souverains et féodaux balkaniques sont absorbés plutôt par leurs préoccupations intérieures ou par leurs aspirations territoriales. Ils sont très

 

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souvent l'un contre l'autre les armes à la main, pour régler de vieux comptes. Voilà pourquoi ayant une fois mis le pied sur la péninsule de Gallipoli et s'étant engagés sur les routes de la Thrace orientale les Osmanlis ne rencontrent pas une résistance organisée et unie. Ils n'ont qu'à surmonter la résistance isolée des différents seigneurs locaux qui ne disposent pas de possibilités illimitées pour leur opposer de suffisantes forces de lutte. L'organisation des forces intérieures de résistance est entravée par l'hostilité de la classe exploitée contre ses seigneurs féodaux. En dépit de toute cette divergence des intérêts et des aspirations des différents milieux de la société balkanique et des différents Etats, la conquête ottomane de la Péninsule balkanique n'est pas triomphale. Elle devient plutôt une pénible série de combats acharnés et de longs sièges et se heurte plus d'une fois à la résistance de braves défenseurs. L'auteur du livre présente pays par pays l'attitude des différentes forces sociales et surtout des milieux dirigeants a l'égard des conquérants tout en mettant en évidence les données témoignant la résistance anti-ottomane des peuples du Sud-Est européen.

 

L'exposé laisse comprendre d'une manière bien argumentée que le progrès des Osmanlis est dû surtout au fait qu'au moment de leur apparition dans cette zone de l'Europe ils y trouvent des Etats et des sociétés ayant déjà atteint un niveau très élevé de féodalisme aux traits caractéristiques qui lui sont propres: la polarisation des forces sociales et la décentralisation de l'Etat. Le pouvoir central dans les différents pays n'est plus à même d'organiser ces forces sociales en proie de contradictions insurmontables.

 

Cette réalité bien complexe entrave la réalisation de grands essais d'unions anti-ottomanes. L'impasse dans laquelle se trouvent les sociétés balkaniques vis-à-vis des conquérants ottomans devient encore pire à cause du fait qu'en ce moment peu d'Etats en Europe avaient des intérêts politiques dans le Levant et étaient disposés de participer aux entreprises anti-ottomanes.

 

Le troisième chapitre est consacré à l'aspect général du régime ottoman établi dans les terres balkaniques à la fin du XIVe siècle et la première moitié du XV« siècle, en décrivant les premières institutions osmanlies et les particularités du régime que les conquérants établissent dans les Balkans. Cet exposé, l'un des rares exposés existant dans la littérature scientifique et présentant une étude d'ensemble de cette époque, élucide le processus complexe et peu étudié de l'action réciproque entre l'héritage balkanique trouvé sur place dans le domaine de la vie économique et sociale et les nouvelles institutions ottomanes.

 

En établissant leur régime, les Osmanlis adoptent quelquesunes des institutions balkaniques qu'ils ont trouvées sur place en essayant de les adapter au service de leurs intérêts. Ainsi, ils n'apportent pas des changements notables au régime agraire existant dans les Balkans. Pourtant, à la différence des Etats balkaniques médiévaux ils imposent le sipahilik — possession féodale conditionnelle liée avec l'accomplissement d'obligations militaires et administratives envers le pouvoir central.

 

En édifiant son réseau administratif dans les terres balkaniques, le pouvoir ottoman aspirait aussi à conserver les frontières des domaines et des biens féodaux tels qu'ils étaient au moment de l'arrivée des Osmanlis.

 

Le pouvoir des conquérants n' introduit pas des changements radicaux dans le statut de la population asservie. Lors de l'établissement du système agraire, dans lequel prédomine le sipahilik avec des immunités minimales, les paysans disposent de la terre de leurs exploitations dans le cadre de la dépendance féodale.

 

Bien que le servage n'existe pas ici dans sa forme classique, les paysans n'ont p as droit de disposer librement de leurs terres, dont ils ont été des détenteurs chargés d'obligations féodales.

 

Cependant, mus par des hautes considérations d'Etat — en vue de consolider leur domination et forcés par les circonstances existant dans les Balkans — les gouvernants ottomans n'imposent pas à toute la population le statut de raya. Ils sont obligés d'accepter, légaliser et mettre au service de leur pouvoir certains groupes de population qui occupent une place plus particulière et

 

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jouent un rôle plus spécial au sein de la société balkanique médiévale, tels que les Valaques par exemple.

 

Le progrès des conquérants ottomans dans les Balkans menace de plus en plus sérieusement l'Europe qui, jusqu'alors était presque impassible à l'égard du destin des peuples balkaniques conquis.

 

Le roi de la Hongrie Sigismond était le premier à comprendre le sérieux de ces nouvelles conditions et prend l'initiative de former une coalition et profiter des moments favorables pour repousser les Osmanlis. Malheureusement, il n'est pas très conséquent dans ses initiatives. En outre, la Hongrie ne pouvait opposer â l'élan des forces militaires ottomanes que l'armée féodale à la combativité réduite.

 

C'est au talentueux, perspicace et énergique chef militaire Jean Hunyade que revient le mérite d'avoir compris la nécessité d'organiser une nouvelle force armée. Doué de clairvoyance et de sagesse militaire et politique, Hunyade fut un partisan convaincu de la nécessité d'un pouvoir central fort. Ses efforts à émousser l'influence des magnats et des hauts dignitaires, afin d'affermir le principe centraliste en vue du salut du pays contribuent au développement d'un processus progressiste pour son temps — l'établissement d'une monarchie centralisée qui devait-mettre fin, par son unité et son ordre intérieur, au chaos de la réalité féodale et aux interminables discordes et guerres intestines.

 

Son intuition d'homme d'Etat et de chef militaire l'oriente vers la recherche d'appui contre l'offensive ottomane au sein du peuple.

 

Hunyade comprend très bien que pour lutter contre un ennemi aussi fort et solidement établi dans les Balkans comme les Osmanlis, la Hongrie avait besoin d'attirer à soi les peuples conquis ou menacés d'être asservis dans le Sud-Est européen et de trouver des alliés en Europe chrétienne.

 

A la même époque, au moment même ou les Osmanlis s'emparent l'une après l'autre des forteresses balkaniques et mettent à sac les régions frontalière» de la Hongrie, la Bohème est en pleine effervescence par les guerres hussistes. C'est seulement après la fin des guerres hussistes que les combattants populaires affluent dans l'armée de Hunyade.

 

L'avance ottomane inquiète encore moins les plans politiques des milieux gouvernants en Pologne à la fin du XIVe et au début du XVe s. Leur souci principal est la lutte contre l'Ordre teutonique. La peur du hussisme dévie une partie de l'aristocratie polonaise sous la direction du cardinal Olesnicki de l'union avec la Bohême et l'oriente vers une union avec la Hongrie. Sur le trône hongrois rendu vacant monte le jeune Jagellon Ladislas III. Liée de cette manière avec la Hongrie, les relations avec l'Etat ottoman deviennent pour la Pologne aussi un important problème de politique étrangère.

 

A cette époque la puissance séculaire de la Papauté n'est plus qu'un lointain souvenir. Dans le but de consolider l'autorité du «Saint Siège» et de réaliser ses anciens plans de suprématie en Europe du Sud-Est, le pape Eugène IV avait pris volontiers l'initiative d'unir le monde catholique européen contre les Osmanlis.

 

Parmi les républiques maritimes italiennes entretenant des relations avec le Sud-Est européen, Venise a participé plus que les autres dans les combinaisons et les rivalités politiques découlant de la pénétration ottomane dans les Balkans.

 

Aussi bien Venise que Gênes négligent avec une stupéfiante imprévoyance l'impératif historique d'unir leurs forces et aider les ennemis des Osmanlis.

 

Dans l'Italie désunie on pouvait compter encore moins sur les autres forces politiques pour une lutte contre les conquérants osmanlis.

 

Les événememts fatals qui se déroulaient dans les Balkans n'inquiétaient par leur écho lointain même les grands Etats occidentaux — l'Angleterre, l'Allemagne, la France et l'Espagne. Seul le duc de Bourgogne Philippe le Bon accorde une grande attention et dépense de l'argent et des efforts pour l'organisation et le soutien de la coalition anti-ottomane.

 

En un mot, la situation politique en Europe était telle que cette dernière

 

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n'était pas en état d'opposer aux Osmanlis une coalition chrétienne unie et solide. C'est seulement après les grandes victoires de Hunyade sur Mezid pacha et Chehabedin pacha que les pays européens les plus menacés commencèrent a s'intéresser au sort des peuples balkaniques.

 

Par une bulle spéciale le pape avait ouvert une campagne visant à organiser une expédition contre les Osmanlis. le Conseil d'Etat hongrois, exhorté surtout par le légat du pape Cesarini et le despote serbe Georges Brankovitch, qui désirait recouvrer son despotat asservi par les Osmanlis et libérer ses fils tenus comme otages par le sultan, décida l'organisation d'une croisade. Ladislas lui-même accepte cette initiative en vue d'affermir sa situation ébranlée par les luttes dynastiques intestines. Pendant ce temps la Curie papale et le sénat de Venise poursuivent des pourparlers, qui se transforment en interminables marchandages pour déterminer qui doit assumer les charges matérielles de l'armement de la flotte chrétienne devant prendre part à la prochaine campagne.

 

Les peuples balkaniques attendaient avec impatience le développement de ces événements. La situation politique dans les Balkans était favorable pour l'organisation d'une action commune contre les Osmanlis. Les conquérants n'étaient encore très solidement établis dans la Péninsule. Le sultan était absorbé par les soucis que lui créait l'émir insoumis de Karaman. Ce dernier essayait de se mettre en relation avec la coalition anti-ottomane européenne.

 

C'est dans ces conditions que l'armée chrétienne unie traverse le Danube. Elle se composait de «croisés de différentes nationalités», surtout des Hongrois, Tchèques et Valaques. En Serbie 8 000 combattants locaux et des forces du voévode de Bosnie Petar Kovatchévitch se rallient à l'armée. Conduite par Brankovitch l'armée est dirigée vers Krouchévatz. Vers Nich l'habile Hunyade défait trois armées osmanlies et livre une bataille décisive le 3 novembre 1443. Les croisés surprennent les Osmanlis non préparés. Ces derniers n'opéraient qu'avec les troupes de Roumélie, dont les chefs manquaient d'unanimité dans leur commandement. La défaite de Nich donna du courage à la population balkanique. A l'armée s'enrôlaient tous les jours de nombreux Bulgares, Albanais, Bosniaques et Serbes.

 

L'Albanie était en agitation sous la direction de Georges Kastrioti (Skenderbeg) qui s'était enfui de l'armée ottomane après la défaite de Nich.

 

Les croisés s'étaitent emparés et avaient dévasté Pirot. Les armées osmanlies défaites reculaient sans cesse, sous la poussée de l'ennemi, vers Sofia sous le commandement de Kassim pacha, bey de Roumélie. Le sultan s'était vu obligé de convoquer le Conseil d'Etat en vue d'examiner la situation. Tous les musulmans aptès à porter les armes sont enrôlés sous les drapeaux. Le sultan lui-même se met en campagne au cours d'un hiver extrêmement rigoureux et renforce la défense d'Andrinople et de Stanimaka.

 

En route vers Sofia les croisés rencontrent un détachement de cavalerie bulgare, auquel Hunyade confie la charge d'être l'avantgarde de ses troupes. A Sofia, encouragés par les aspirations libératrices de la population locale bulgare, les croisés nomment un évêque comme gouverneur de la ville a la place des anciens gouvernants turcs et transforment de nouveau en église la Sainte Sophie, dont les Osmanlis avaient fait une mosquée. La population de la Bulgarie du sud-ouest et les voynouks aidaient par tous les moyens les croisés.

 

A l'annonce des grandes victoires Venise devient également plus active, en cherchant à ne pas être en retard dans la rivalité des pays européens par rapport aux Balkans. Cette rivalité est en quelque sorte le stimulant de la coalition des croisés, camouflée sous le fallacieux prétexte de sauver le christianisme du danger musulman. Mais les armées chrétiennes sont arrêtées par les routes difficilement praticables de la Porte de Trajan, où les Turcs, ayant fortifié les cols de montagne, livrèrent une farouche bataille. Les troupes chrétiennes se virent obligées par la rigueur de l'hiver de se retirer en infligeant une défaite terrible aux Osmanlis dans le défilé de Pirot.

 

«La longue» campagne de 1443 a une grande importance pour le sort du Sud-Est européen et pour le monde chrétien de ce temps. Elle prouve à toute

 

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l'Europe que la puissance osmanlie est vulnérable lorsqu'elle est en prise avec les forces chrétiennes unies et bien armées. Cette campagne met aussi à jour impréparation des Turcs et l'absence de cohésion au sein des milieux gouvernants ottomans et leur forces combatives.

 

Au cours de la «longue» campagne apparaissent les aspirations libératrices et la capacité combative de la population balkanique surtout des Bulgares.

 

Ces circonstances qui, dans une grande mesure, mettent en question l'avenir de la domination ottomane en Europe du sud-est, obligent le pouvoir suprême à conclure la paix avec les forces ayant organisé l'expédition des croisés de 1443.

 

D'importantes considérations politiques forcent Ladislas III Jagellon d'accepter les pourparlers de paix, tandis que d'autres raisons l'obligent à continuer la lutte. L'influence de ces circonstances contradictoires préjugent aussi la duplicité du roi au cours des mois précédant la deuxième campagne.

 

Les Balkans sont en effervescence. L'empereur byzantin provoque des guerres intestines dynastiques au sein des Osmanlis, en sortant sur la scène Orkhan Tchélébi (Duzmé) — prétendant au trône. Le souverain de Karaman se soulève à nouveau et attire en Anatolie les forces ottomanes commandées par Mourad II lui-même.

 

Après une longue et vaine attente, les troupes unies chrétiennes se mettent en marche à peine au cours de l'automne 1444 dans des conditions encore plus défavorables que l'année précédente.

 

Au cours de toute sa marche à travers les terres bulgares, de Vidin à Varna, les troupes chrétiennes sont aidées plus d'une fois par les Bulgares. Près de Nikopol des combattants valaques viennent grossir les rangs.

 

La bataille de Varna, à laquelle participent bravement et font sacrifice de leur vie des combattants de plusieurs peuples européens, est décrite dans l'ouvrage sur la base d'une analyse très détaillée de toutes les sources historiques. La malheureuse issue pour les chrétiens de cette bataille, dans laquelle la fortune avait accompagné les croisés presque jusqu' à sa fin, est le résultat de plusieurs circonstances. En premier lieu — la saison choisie pour la deuxième campagne est inopportune. Les forces européennes perdent de longs mois en d'inutiles pourparlers de paix, dans des hésitations pour ou contre une nouvelle campagne, dans des rivalités mutuelles. Ainsi elles aident le pouvoir ottoman à surmonter la grave crise résultant de la première campagne, le mouvement Insurrectionnel dans les Balkans et en Anatolie. L'absence d'unité des intérêts et des aspirations des différents facteurs européens engagés dans l'organisation d'une nouvelle campagne, fait échouer la tâche de la flotte alliée — d'empêcher le transfert de forces ottomanes de l'Anatolie en Europe.

 

L'itinéraire de la campagne, entreprise pendant la mauvaise saison, passe par des régions possédant un vaste réseau de forteresses et de garnisons ottomanes. L'armée alliée, moins nombreuse cette fois, subit des pertes dans des combats avec ces garnisons. En outre, cette armée manque de cohésion et d'unité dans les actions 'des différents détachements conformément au plan établi d'avance. Elle manque aussi d'un solide commandement unifié.

 

Au contraire, le commendement centralisé des Osmanlis contribue, même au moment d'une défaite totale, à ce que toutes les forces s'unissent autour du sultan et réorganisent leurs rangs. Les Osmanlis se trouvent dans une situation plus favorable car ils combattent sur un terrain où ils disposent de réserves de forces combatives et de sources d'approvisionnement.

 

L'issue de la bataille de Varna n'est pas tellement favorable aux Osmanlis. Au cours du combat avaient apparu des symptômes d'instabilité interne. Les désertions en masse des féodaux osmanlis, même jusqu'à l'étape décisive de la bataille, attestent que la crise existant au sein du système ottoman n'est pas surmontée et que le pouvoir suprême avait de sérieux problèmes à résoudre.

 

Les pertes subies étaient tellement graves que les Osmanlis n'étaient pas en état de profiter des difficultés du front chrétien et attaquer l'Europe centrale. Des complications dynastiques interviennent aussi.

 

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Les conséquences de la bataille de Varna se révèlent fatales non seulement pour les Balkans, mais en général pour tout le Sud-Est européen. La défaite des combattants alliés ébranle encore davantage la fragile coalition, dont l'unité était sans cesse minée par les rivalités entre les différentes forces politiques qui y participaient. Après Varna l'Europe renoncera pour longtemps aux grandes coalitions contre les Turcs — elle manque de très importants moments pour asséner aux Osmanlis des coups fatals pour leur domination en Europe.

 

Malgré son issue tragique, la grande bataille de Varna constitue un épilogue des efforts d'union de différents peuples au nom d'un grand dessein — le salut de l'Europe et ses réalisations culturelles.

 

D'un autre côté, les deux campagnes et la bataille de Varna ont éveillé, soutenu et encouragé les aspirations libératrices de la population balkanique.

 

La bataille de Varna et les événements qui l'ont précédés constituent une page lumineuse de l'histoire des relations amicales entre les Slaves de l'Ouest et du Sud.

 

La lutte des peuples balkaniques au cours des XIVe et XVe siècles, dans laquelle leur participation aux campagnes de 1443—1444 occupe une place considérable, est d'une importance paneuropéenne. Les peuples balkaniques et surtout le peuple bulgare ont préservé, par leur résistance et leurs sacrifices, le monde européen de l'expansion ottomane en sauvant ainsi sa civilisation.

 

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