L’«homme» du basileus

 

Jean-Claude Cheynet

 

 

Puer Apuliae. Mélanges offerts à Jean-Marie Martin, éd. E. Cuozzo, V. Déroche, A. Peters-Custot et V. Prigent, vol. 1, 139-154

(Centre de recherche d’histoire et civilisation de Byzance, Monographies 30), Paris 2008

 

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L’Empire byzantin a conservé l’héritage romain qui donnait à la puissance publique, représentée par l’empereur et ses fonctionnaires, le pas sur tous les intérêts privés et les liens personnels. Cette caractéristique, souvent soulignée, semblait distinguer le basileus des souverains contemporains. Il commandait directement à tous ses sujets sans la médiation de pouvoirs intermédiaires, comme il s’en était progressivement constitué en Occident. Cependant, on a souligné depuis longtemps que ce tableau mérite d’être singulièrement retouché [1]. Les liens personnels régissent toute la société et le basileus ne peut pas vraiment s’en affranchir. Il gouverne l’Empire en s’appuyant sur les élites locales, qu’il a divers moyens de s’attacher : distribution de dignités avec les rogai correspondantes, nomination aux postes élevés de l’administration, invitation des enfants à la cour, qui se trouvent à la fois favorisés dans leur future carrière par la proximité impériale et otages, en quelque sorte, garants de la loyauté de leurs parents.

 

Parmi l’entourage du magnat byzantin, une catégorie se distingue par le dévouement à son maître, celles des anthrôpoi, les «hommes» de ce personnage. Ils se distinguent à la fois des parents, liés par le sang, des simples serviteurs ou esclaves, fort éloignés du maître par la hiérarchie sociale, mais également par la liberté de l’anthrôpos d’entrer au service de son maître. A lire les sources, on a l’impression que chaque maître d’une maison dispose d’un nombre assez réduit de proches qu’il appelle ses «hommes». C’est cette liberté qui fait la valeur du lien entre les deux hommes. Ce lien d’ordre privé est toutefois reconnu puisque des fonctionnaires partent prendre leur poste en province, accompagnés de leurs «hommes»,

 

 

1. Pour ne citer que deux travaux sur les liens de dépendance et de fidélité : J.-Cl. Cheynet, Pouvoir et contestations à Byzance (963-1210), Paris 1990 (Byzantina Sorbonensia, 9), p. 287-301 et, tout récemment, E. Patlagean, Un Moyen Âge grec. Byzance IXe-XVe siècle, Paris 2007 (L’évolution de l’humanité), p. 163.

 

 

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qui occupent eux aussi une fonction officielle [2]. Le cas le plus banal est celui du juge qui place un ou plusieurs de ses hommes parmi les notaires, ou celui du général qui combat au milieu de ses hommes, officiers dans son armée. Les sceaux confirment le caractère officiel de ces liens. Certains mentionnent la fonction exercée par le subalterne [3], d’autres, le plus souvent, se contentent de souligner la dépendance [4]. On notera que les dignités de ces personnages sont toujours inférieures à celles portées par leurs patrons. Il n’y a là rien de surprenant, mais on peut supposer qu’ils les auront obtenues par l’intermédiaire de ces derniers.

 

Les empereurs ont toujours eu besoin de s’appuyer sur des fidèles choisis qui leur doivent tout. Cela vaut pour les usurpateurs, mais aussi pour des empereurs légitimes, comme Basile II qui, craignant l’influence de l’aristocratie micrasiatique, constitua un groupe d’hommes sûrs, au premier rang desquels figure l’épi tou kanikleiou Nicéphore Ouranos. Cette présence des «hommes» de l’empereur n’est donc pas liée à l’influence de l’Occident, perceptible seulement au temps des Comnènes.

 

Pour repérer ces hommes de l’empereur, nous disposons des sources narratives et documentaires, mais elles sont très lacunaires et ne révèlent au mieux que quelques noms par règne. La principale source prosopographique pour l’époque médio-byzantine est

 

 

2. Dans les archives d’Iviron, on trouve une grande variété d’exemples : le spatharocandidat Georges, homme du duc Nicéphore Botaneiatès (Actes d’Iviron II, Du milieu du XIe siècle à 1204, éd. J. lefort, N. Oikonomidès, D. Papachryssanthou, avec la coll, de V. Kravari et H. Métrévéli, Paris 1990 [Archives de l’Athos, 16], acte n° 35, p. 103 [1062]); l’asèkrètis Pierre, homme du juge Nicolas Serblias (ibid., p. 104); le magistre et vestarque Chrysodactylos et le protovestès et juge de l’Hippodrome, Jean Mélidonès, tous deux hommes du césar Nicéphore Mélissènos (ibid., acte n° 43, p. 146 et 149 [1085]); le notaire impérial des oikeiaka et vestès Michel, homme de Grégoire Xèros, dikaiophylax et anagrapheus de Boléron, Strymon et Thessalonique (ibid., acte n° 45, p. 167 [1090-1094]). Les autorités ecclésiastiques disposent de leurs hommes : Iôannikios, moine, économe de la Grande Eglise, l’homme du très saint patriarche (ibid., acte n° 40, p. 126 [1071]); Euthyme, l’homme de l’évêque d’Ézova, en Macédoine orientale (ibid., acte n° 46, p. 166). Il est même fait mention des hommes d’un sékréton, celui de l’économat du patriarche (ibid., acte n° 40, p. 126). Est-ce une autre manière de désigner des fonctionnaires? Ou bien une façon de considérer que le sékréton aurait ses dépendants comme tout puissant propriétaire?

 

3. Jean, notaire, anthrôpos de Constantin Dalassènos, anthypatos, catépan d’Antioche (vente aux enchères Münz Zentrum 76 [1993], n° 36 d’un lot).

 

4. Drazimir, protospathaire, hypatos, homme du curopalate et domestique des Scholes (I. Jordanov, Corpus of Byzantine Seals from Bulgaria, II, Byzantine Seals with Family Names, Sofia 2006 [Coinage and coin circulation on the Balkans, 7; Corpus of the seals from mediaeval Bulgaria, 2], n° 208 [désormais Jordanov, Corpus II]. Le domestique en question était Jean Comnène, frère de l’empereur Isaac); Grégoire, spatharocandidat, et homme de Diogénès, est attesté par un plomb de l’ancienne collection Zarnitz (J.-Cl. Cheynet, La société byzantine. L’apport des sceaux, Paris 2008 [Bilans de recherche, 3, 1-2], p. 576). Est-il à rapprocher de la bulle de Grégoire, spatharocandidat, homme du duc (G. Zacos, Byzantine Lead Seals, Compiled by J. W. Nesbitt, Berne 1985, n° 817 [désormais Zacos II])? Abidélas, homme du proèdre Chasanès, sur son plomb datant de la seconde moitié du XIe siècle (inédit, DO 58.106.4455); Léon, protospathaire, homme du proèdre Epiphane (inédit, Fogg 852); Georges, homme de Romain, oikistikos et mandatôr du logothète du drome (Al.-K. Wassiliou - W. Seibt, Die byzantinischen Bleisiegel in Österreich. 2. Teil. Zentral- und Provincialverwaltung, Vienne 2004 [Veröffentlichungen der Kommission für Byzantinistik, 2-2 ; Denkschriften — Osterreichische Akademie der Wissenschaften. Philosophisch-historische Klasse, 324], n° 57, etc.). Tous ces sceaux datent du XIe siècle.

 

 

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fournie par les sceaux des fonctionnaires et des dignitaires, conservés en grand nombre. En principe, les fidèles de l’empereur sont pourvus de charges et de dignités et, pour cette raison, ne se distinguent pas des autres serviteurs de l’Empire. Toutefois le titre (?) d’anthrôpos apparaît sur des sceaux à partir du Xe siècle [5] et plus tard celui, très précis, d’anthrôpos du basileus, en concurrence ou en complément des termes oikeios anthrôpos [6] ou encore doulos du basileus. Cette titulature vient souvent en sus d’autres fonctions. Les sources documentaires fournissent des exemples parallèles qui, combinés à l’apport des sceaux, offrent des éléments pour déterminer le profil de ces anthrôpoi impériaux, ce qui permettra peut-être de mieux comprendre pourquoi ils apparaissent au XIe siècle.

 

Quels rapports ces anthrôpoi entretiennent-ils avec les basilikoi anthrôpoi cités dans les sources de cour, qui forment un tagma, commandé par un catépan [7]? Écartons d’emblée une catégorie particulière de fonctionnaires, appelés simplement basilikoi (et jamais basilikoi anthrôpoi). Ce sont des agents du fisc et leur fonction est le plus souvent accompagnée du nom de la circonscription sur laquelle ils ont autorité [8]. Écartons également les basilikoi mentionnés à plusieurs reprises par Constantin VII dans le De administrando imperio, car toutes les occurrences montrent qu’il s’agit simplement de fonctionnaires impériaux que rien ne distingue spécifiquement, sinon qu’ils sont engagés dans des missions diplomatiques de confiance [9]. Il pourrait en revanche s’agir d’une formation militaire des gardes rapprochés de l’empereur. Nous avons par l’Alexiade le témoignage d’une telle situation : Alexis Comnène va au combat entouré de quelques soldats d’élite, tous issus de la haute aristocratie, mais pas assez nombreux pour former un tagma [10].

 

Les basilikoi anthrôpoi figurent dans les listes de préséance des IXe et Xe siècles. Ils sont commandés soit par un catépan des impériaux, soit par un protospathaire des impériaux,

 

 

5. Un sceau de l’ancienne collection Shaw, conservé à Dumbarton Oaks (DO 47.2.423) date de la première moitié du Xe siècle. Au droit, un monogramme cruciforme invocatif et, au revers, la légende identifiant le signataire à Constantin, spatharocubiculaire et anthrôpos du despote aimé du Christ. Cette formule, exceptionnelle, correspond à une situation remarquable. Le despote en question est sans doute Constantin VII, qui avait besoin, soit au temps de Lécapène, soit encore après la chute de ce dernier, de disposer de soutiens personnels. La formule anthrôpos du despote n’est pas l’exact équivalent de la formule employée au siècle suivant d’anthrôpos du basileus.

 

6. Cecaumeni consilia et narrationes, éd. et trad. G. G. Litavrin, Sovety i rasskazy Kekavmena: socinenie vizantijskogo polkovodca XI veka, Moscou 1972, p. 286.

7. On a conservé le sceau d’un catépan des impériaux, à peu près contemporain du Clétorologe de Philothée : Théoctiste, protospathaire et catépan des basilikoi anthrôpoi (Wassiliou - Seibt, Bleisiegel II [cité n. 4], p. 301, n. 348).

8. H. Glykatzi-Ahrweiler, Recherches sur l’administration de l’empire byzantin aux IXe-XIe siècles, BCH 84, 1960, p. 1-111 = Études sur les structures administratives et sociales de Byzance, Londres 1971 (Variorum reprints, collected studies, 5), VIII, p. 73.

9. Constantine Porphyrogenetus, De administrando imperio, éd. G. Moravcsik, traduction anglaise par R. J. H. Jenkins, Washington (DC) 19672 (CFHB, 1), s. v. basilikos.

10. Au moment de la déroute face aux Petchénègues à Dristra, Alexis est entouré de vingt braves cavaliers dont Nicéphore Diogène, Michel Doukas et des serviteurs de sa famille (Anne Comnène, Alexiade, éd. B. Leib, Paris 19672 [Les Belles Lettres, Collection byzantine], II, p. 98; Annae Comnenae. Alexias. Pars prior. Prolegomena et textus, ree. D. R. Reinsch - A. Kambylis, Berlin - New York 2001 [CFHB, 40/1, Sériés Berolinensis], p. 212).

 

 

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soit par un préposé aux impériaux, ou encore par un domestique des impériaux. En réalité, dans chacune de ces listes, on ne relève pas simultanément plus de deux de ces fonctionnaires, dont systématiquement le domestique des impériaux et un supérieur, qui a un des trois autres titres nommés précédemment. La hiérarchie se détermine en fonction des sportules reçues lors de la promotion de certains dignitaires [11]. Les dénominations de domestique ou catépan indiquent le commandement d’un tagma.

 

D’après les nombreuses mentions du Clétorologe de Philothée, les basilikoi anthrôpoi ne constituent pas, semble-t-il, un ensemble homogène, mais recouvrent plusieurs catégories de proches de l’empereur. Ils sont souvent cités à l’occasion des cérémonies impériales auxquelles ils participent, notamment les banquets [12], ce qui suggère une fréquentation assidue du Palais et une résidence à Constantinople. Leur place est toujours honorable, avec les plus hauts dignitaires [13], avec les archontes des tagmata [14] ou les petits archontes des Excubites [15]. Ils ne sont pas toujours titrés, mais lorsqu’ils le sont, leurs dignités sont comprises entre celle de protospathaire et celle de stratôr, du moins au temps de Léon VI.

 

L’expression basilikoi anthrôpoi désigne, dans la plupart des cas, les détenteurs d’une dignité impériale égale au plus à celle de protospathaire. Certains sont affectés à des salles du Palais, comme le Chrysotriklinos ou le Lausakios; l’atriklinès Philothée mentionne ainsi les spatharocandidats oikeiakoi du Lausakios, les spathaires et les stratôrés [16]. Ces dignitaires-là sont ensuite qualifiés par Philothée d’«impériaux du Lausakios [17].» Par ailleurs, au banquet de Noël, sont conviés les hommes de l’empereur, «tous venant des nations barbares, des Pharganoi, des Khazars, des Agarènes et des Francs, ainsi que tous ceux qui jouissent de la provision de rogai impériales au titre de ces barbares [18].» Les invités étaient donc des étrangers, appartenant à l’hétairie moyenne et à la troisième, mais aussi des dignitaires qui avaient acheté une rente viagère sur une hétairie [19].

 

Si l’on combine l’ensemble de ces éléments, on peut conclure que les hommes de l’empereur formaient un groupe de dignitaires attachés à la garde de certaines pièces de réception du Palais, parmi lesquels se trouvait un contingent d’étrangers. On observe donc un large recoupement avec les hétairies. Celles-ci accompagnaient l’empereur dans ses déplacements, y compris à Constantinople. L’hétériarque avait le droit de monter sur le dromôn impérial. Tout rebelle prétendant à l’Empire se constituait une hétairie chargée

 

 

11. N. Oikonomidès, Les listes de préséance byzantines des IXe et Xe siècles. Introduction, texte, traduction et commentaire, Paris 1972 (Le monde byzantin), index s. v.

12. Le lundi de Pâques, certains d’entre eux sont invités à la table d’or de l’empereur (Oikonomidès, Listes [cité n. 11], p. 205).

13. A la cérémonie de l’anniversaire commémorant l’inauguration de la Néa, les basilikoi anthrôpoi accompagnent les magistres, préposites et patrices (Oikonomidès, Listes [cité n. 11], p. 215).

14. Ibid., p. 173.            15. Ibid., p. 207.            16. Ibid., p. 149, 151, 155.            17. Ibid., p. 227.            18. Ibid., p. 177.

19. N. Oikonomidès, Some Byzantine State Annuitants: Epi tes (megales) Hetaireias and Epi ton Barbaron, Symmeikta 14, 2001, p. 9-28.

 

 

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de sa protection rapprochée [20]. Les hommes qui gardaient les portes du Palais étaient soumis à l’autorité de l’hétériarque, comme à celle du protovestiaire [21]. Sans doute, les basilikoi anthrôpoi appartenaient-ils tous aux hétairies, mais il est peu probable, en revanche, que tout membre des hétairies eût été considéré comme un «anthrôpos de l’empereur»; ainsi s’explique la distinction faite, dans les listes de préséance, entre l’hétériarque et le catépan des impériaux.

 

Sur leurs plombs, ces hommes de l’empereur soulignaient leur appartenance à l’hétairie, même ceux qui avaient acheté leur roga, qui pouvaient être des civils [22]. Presque tous les sceaux conservés d’épi tès hétaireias datent du Xe siècle. Cependant, les hétairies se maintiennent après cette date et apparaissent toujours dans l’action comme les protecteurs de l’empereur, quand celui-ci est personnellement engagé dans un combat [23]. L’hétériarque commande en effet les régiments étrangers, mais l’hétairie continue de recruter des Grecs. Romain Boïlas, favori de Constantin IX Monomaque, en avait été membre avant sa foudroyante ascension politique [24]. Nous n’avons pas de liste de préséance pour le XIe siècle, mais les basilikoi anthrôpoi sont systématiquement mentionnés dans les listes d’exemption du dernier quart du XIe siècle, qui en tiennent lieu. Dans ce contexte, il s’agit de fonctionnaires en mission spéciale, puisque y sont consignées, de manière très précise, toutes les charges envers les autres fonctionnaires incombant au monastère de Lavra [25].

 

C’est précisément au XIe siècle qu’apparaît sur des sceaux, certes en petit nombre, la mention «homme de l’empereur». Cette formulation nouvelle, qui les distingue des basilikoi anthrôpoi, implique un changement par rapport à l’époque précédente. Il faut connaître le profil de ces personnages pour comprendre quel fut leur rôle par rapport à l’empereur.

 

 

20. Ainsi, Bardas Phocas révolté en 971 contre Jean Tzimiskès (Leonis Diaconi Caloënsis historiae libri decem, éd. C. B. Hase, Bonn 1828 [CSHB], p. 116; trad. angl. A.-M. Talbot et D. F. Sullivan, The History of Leo the Deacon, Washington [DC] 2005 [DOS, 41], p. 165). En 976, Bardas Sklèros se révolta contre le parakoimomène Basile, qui gouvernait l’Empire pour le compte du jeune Basile II, et fit assassiner son hétériarque qu’il soupçonnait de vouloir le trahir (Ioannis Scylitzae Synopsis Historiarum, éd. I. Thurn, Berlin - New York 1973 [CFHB, 5, Sériés Berolinensis], p. 318; trad. fr. B. Flusin et annoi. J.-Cl. Cheynet, Empereurs de Constantinople, Paris 2003 [Réalités byzantines, 8], p. 266 [désormais Flusin - Cheynet]).

 

21. Πεῖρα ἤγουν διδασκαλία ἐκ τῶν πράξεων τοῦ μεγάλου κυροῦ Εὐσταθίου Ῥωμαίου, J. et P. Zépos, Jus Graecoromanum IV, Athènes 1931, XLI, 29, p. 218.

22. À titre d’exemple, citons le plomb d’Etienne, protospathaire impérial, épi tès mégalès hétaireias, épopte de Paphlagonie (Catalogue of Byzantine Seals at Dumbarton Oaks and in the Fogg Museum of Art, IV. The East, ed. E. McGeer, J. Nesbitt, N. Oikonomidès, Washington [DC] 2001, n° 11.7).

23. Les hétairies impériales ramenèrent sain et sauf Romain III Argyre, après la déroute enregistrée lors de la campagne de Syrie (Skylitzès [cité n. 20], p. 381, Flusin - Cheynet [cité n. 20], p. 316).

24. Skylitzès (cité n. 20), p. 473; Flusin - Cheynet (cité n. 20), p. 390.

25. Par exemple, Actes de Lavra I, éd. P. Lemerle, N. Svoronos, A. Guillou, D. Papachryssanthou (Archives de l’Athos, 5), Paris 1970, p. 218 (1079), p. 240 (1081), p. 274 (1097). Dans cette dernière référence sont opposés les basilikoi anthrôpoi et les idiôtikoi anthrôpoi, c’est-à-dire les hommes du basileus et ceux qui servent un autre que le basileus. Sur les longues listes d’exemption, cf. N. Oikonomidès, Fiscalité et exemption fiscale à Byzance (IXe-XIe s.), Athènes 1996 (Fondation nationale de la recherche scientifique. Institut de recherches byzantines. Monographies, 2), p. 273-283.

 

 

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Leur statut social et leurs dignités sont les deux fondements de l’enquête.

 

Dressons la liste des «hommes de l’empereur» connus :

 

par les sources documentaires :

Pépagoménos, sébastophore et anthrôpos de l’empereur Alexis [26],

Constantin, vestarque et logariaste [27],

Pierre, vestès [28],

Jean, protoproèdre, logothète du drome et oikeios anthrôpos [29],

Constantin Choirosphaktès, protoproèdre, épi tôn déèséôn et oikeios anthrôpos [30],

Nicolas Tzantzès, notaire impérial du bureau du sacellaire, juge et anagrapheus des Cyclades [31],

Eustathe Charsianitès, stratège et pronoètès de Samos [32],

Christophore Kopsènos, magistre, grand chartulaire et anagrapheus de Kos [33].

 

par les sceaux :

Ab..., stratège et h. du basileus (Zacos [BnF] 3490, cf. infra appendice),

Anastase, vestarque, teichiôtès et h. du basileus [34],

Constantin, spatharocubiculaire, anthrôpos du philochristos basileus [35],

Constantin, protospathaire, épi tou koitônos, logariaste, h. du basileus [36],

Georges, protospathaire, hypatos et h. du basileus [37],

 

 

26. En 1082, il assistait au procès de Jean Italos (J. Gouillard, Le procès officiel de Jean l’Italien. Les actes et leurs sous-entendus, TM 9, 1985, p. 141).

27. Lavra I (cité n. 25), acte n° 45, p. 246 (1084).

28. Ibid, acte n° 48, p. 258 (1086).

29. Ibid., p. 258.

30. Βυζαντινὰ ἔγγραφα τῆς μονῆς Πάτμου, A – Αὐτοκρατορικά, éd. É. Vranoussi, Athènes 1980, acte n° 6, p. 60 (1088).

31. É. Vranoussi identifie Nicolas Tzantzès à l’homme du basileus qui accompagnait Christodoule, lorsqu’il se rendit à Cos - ce que mentionne son hypotypôsis (Patmos I [cité n. 30], p. 36). Βυζαντινὰ ἔγγραφα τῆς μονῆς Πάτμου, Β - Δημοσίων λειτουργῶν, éd. Μ. Nystazopoulou-Pelekidou, Athènes 1980 [désormais Patmos II], acte n° 53 (1089), p. 72.

32. Ibid.

33. Ibid., acte n°54 (1089), p. 79. Charsianitès est l’homme de la despoina, c’est-à-dire Anne Dalassène, qui a le titre d’impératrice dans la mesure où son fils Alexis lui a concédé le gouvernement des affaires internes dans l’Empire.

34. Sceau DO 58.106.5097.

35. Sceau DO 47.2.423, orné d’un monogramme datable du milieu du Xe siècle.

36. N. P. Likhacev, Molivdovuly greceskovo Vostoka, éd. V. S. Šandrovskaja, Moscou 1991, pi. LXI, n° 7, transcription p. 84. Une pièce en mauvaise condition est conservée à l’IFEB (n° 24).

37. K. M. Konstantopoulos, Βυζαντιακὰ μολυβδόβουλλα τοῦ ἐν Ἀθηναις Ἐθνικοῦ Νομισματικοῦ Μουσείου, Athènes 1917, n° 432. La lecture a été corrigée par V. Laurent, BZ 33, 1933, p. 337.

 

 

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Georges, proèdre et h. du basileus [38],

Guillaume, magistre, stratège de Séleucie et h. du basileus [39],

Jean Kataphlôros, hypatos, notaire impérial et h. du basileus [40],

Jean Libellisios (?), patrice, hypatos, logariaste, strateutès, h. du basileus (cf. infra, appendice),

Jean, préposite, épi tou koitônos, chartulaire du drome de l’Occident, h. du basileus (cf. infra, appendice),

Jean, patrice, hypatos, logariaste, strateutès et h. du basileus (cf. infra, appendice),

Léonce, patrice, xénodochos et h. du basileus (cf. infra, appendice),

Michel, anthypatos, patrice, vestès, akolouthos et h. du basileus [41],

Nestôr, l’h. du souverain Doukas (cf. infra, appendice),

Nicéphore, duc d’Antioche et h. du basileus [42],

Nicétas, épopte de tout l’Occident et h. du basileus (cf. infra, appendice),

Nicétas, patrice, juge du Vélum, du Boléron, du Strymon et de Thessalonique et h. du basileus [43],

Nicolas, anthypatos, patrice, cubiculaire et h. du basileus [44],

Parsakoundènos N., h. du basileus (cf. infra, appendice),

Pierre, patrice et h. du basileus [45],

Théodore, clerc impérial, ek prosôpou d’Abydos et h. du basileus (cf. infra, appendice),

Théodore Marchapsabos, vestès, stratège d’Anazarbe et homme de notre saint empereur [46],

N., spatharocandidat, épi tou chrysotriklinou, anagrapheus de Mésembria, h. du basileus [47].

 

 

38. Sceau DO 47.2.424 (fin XIe siècle).

39. W. Seibt - M.-L. Zarnitz, Das byzantinische Bleisiegelals Kunstwerk. Katalog zur Austellung, Vienne 1997, 2.3.2.

40. G. Schlumberger, Sigillographie de l’Empire byzantin, Paris 1884, p. 480, n° 20. Ce sceau a été réédité : V. Sandrovskaja, Ermitajnye pecari Kataflorov, Antichnaja drevnost’i srednije veka 38, 2008, p. 126. Le plomb est daté du troisième quart du XIe siècle.

41. Sceau inédit du musée archéologique d’Istanbul (inv. n° 1198-321).

42. Schlumberger, Sigillographie (cité n. 40), p. 310, n° 3 ; V. Laurent, La chronologie des gouverneurs d’Antioche sous la seconde domination byzantine, Mélanges de l’Université Saint-Joseph 38, 1962, n° 25; J.-Cl. Cheynet, Sceaux byzantins des musées d’Antioche et de Tarse, TM 12, 1994, n° 50, p. 420-421; Catalogue of Byzantine Seals at Dumbarton Oaks and in the Fogg Museum of Art, V. The East continued, Constantinople and Environs, Unknown Locations, Addenda, Uncertain Readings, ed. E. McGeer, J. Nesbitt, N. Oikonomides†, Washington (DC) 2005, n° 9.7.

43. Catalogue of Byzantine Seals at Dumbarton Oaks and in the Fogg Museum of Art, I. Italy, North of the Balkans, North of the Black Sea, éd. J. Nesbitt - N. Oikonomidès, Washington (DC) 1991, n° 18.26.

44. Sceau Fogg 2281.

45. V. Laurent, Sceaux byzantins inédits, BZ 33, 1933, n° 2.

46. Sceau inédit de la collection Tatiş n° 1789, datable du troisième quart du XIe siècle.

47. I. Jordanov, Corpus of Byzantine Seals from Bulgaria. I, Byzantine Seals with Geographical Names, Sofia 2003 (Coinage and coin circulation on the Balkans, 7 ; Corpus of the seals from mediaeval Bulgaria, 2), n° 47.6.

 

 

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La liste des mentions, tant dans les documents que sur les sceaux, est relativement courte, ce qui implique que le titre d’homme du basileus n’était pas largement distribué et supposait un lien fort avec l’empereur. Dans trois cas, on peut le prouver. L’akolouthos Michel fut un des généraux les plus fidèles de Constantin Monomaque, qui commanda à plusieurs reprises les tagmata [48]. Mais on ignore si Michel était au service personnel de Monomaque avant l’accession au pouvoir de ce dernier, même s’il ne semble pas avoir servi un empereur précédent. Nestor, sans doute eunuque [49], était un vieux serviteur de la famille Doukas, avant de se voir confier une mission officielle. De même, le duc d’Antioche, Nicéphore, eunuque originaire du thème des Bucellaires, est connu dans les sources sous son sobriquet, Nicéphoritzès. Il gouverna Antioche à deux reprises sous le règne de Constantin Doukas, qui semble avoir été très attaché à ce serviteur. Dans ces deux cas, il s’agit d’eunuques [50].

 

La diversité de condition des hommes de l’empereur est étonnante. On rencontre des noms célèbres, comme ceux de Parsakoundènos, Choirosphaktès, Kataphlôros et Tzantzès, ou plus modestes, tel Pépagôménos, à côté de fonctionnaires pourvus de charges assez médiocres, comme celles de teichiôtès ou de xénodochos. La part des militaires y est très limitée. Ce n’est pas ainsi que les empereurs s’assurent la fidélité de leurs principaux généraux. Si l’on admet que Nicéphoritzès, nommé duc d’Antioche, n’est pas officier de profession, la liste comporte seulement quatre militaires, dont deux étrangers, un Arabe (?) et un Latin. Le troisième, Théodore Marchapsabos, est un sujet byzantin, mais d’origine syrienne. Ce personnage, bien connu par plusieurs sceaux, est issu de la seule famille de ce groupe religieux à servir au plus haut niveau les empereurs [51]. Le sceau mentionné plus haut explique sans doute ce particularisme. Théodore, dans des circonstances que nous ignorons, s’est rendu à Constantinople et aura fait allégeance au basileus du moment, peut-être Constantin X Doukas. Enfin, une bonne part se contentent de signaler leur dévouement à la personne de l’empereur, qui suffit à définir leur position sociale. Comment ces hommes sont-ils distingués de la masse des autres serviteurs impériaux ? Nous sommes réduits aux hypothèses. Peut-être s’engageaient-ils à servir l’empereur, leur patron, par un serment particulier qui renforçait la loyauté due par tout sujet à son souverain? Pour Guillaume le Latin c’est certain, mais tous les officiers francs prêtaient sans doute un serment personnel de fidélité à l’empereur.

 

En conclusion, les hommes du basileus, qui n’ont pas de rapport direct avec les basilikoi anthropoi du siècle précédent, apparaissent à une époque bien déterminée, la seconde moitié du XIe siècle. Les documents d’archive datent presque tous du règne d’Alexis Comnène.

 

 

48. Skylitzès (cité n. 20), p. 472-473, 474 ; Flusin - Cheynet (cité n. 20), p. 389-391.

49. Il est titré patrice et préposite sur un sceau. La charge de préposite était toujours confiée à un eunuque. Cependant dans la seconde moitié du XIe siècle, la distinction entre charges d’hommes barbus et charges d’eunuques semble en voie de disparition (Jordanov, Corpus II [cité n. 4], n° 520).

50. Nous ignorons la condition de Michel, akolouthos. Il est à noter que Constantin Monomaque a nommé aux plus hautes charges militaires des officiers issus de grandes lignées (Comnène, Doukas, Sklèros, Bryennios), ou des eunuques (Jean le Philosophe, Constantin le Sarrasin).

51. J.-Cl. Cheynet, C. Morrisson et W. Seibt, Les sceaux byzantins de la collection Henri Seyrig, Paris 1991, n° 55 ; Seibt - Zarnitz, Das byzantinische Bleisiegel als Kunstwerk (cité n. 39), 4.1.2.

 

 

147

 

Il ne s’agit pas du hasard de la conservation, puisque nous avons une abondante documentation pour les monastères de Lavra et d’Iviron, tout au long du XIe siècle. Les «hommes» mentionnés antérieurement à 1081 sont tous des serviteurs de fonctionnaires de haut rang, suivant une tradition ancienne. Pourtant, l’officialisation du titre d’«homme» du basileus apparaît sur les sceaux dès l’époque de Constantin IX. Cette innovation paraît liée aux troubles consécutifs à la fin de la dynastie macédonienne, lorsque les empereurs cherchaient à asseoir un pouvoir toujours fragile. La documentation, dans son état actuel, semble dater cette création du règne de Constantin IX Monomaque. Cet empereur nomma à de hautes charges des hommes qui l’avaient servi quand il n’était encore qu’un personnage privé (idiôtès) [52]. S’il s’avère que le règne de Constantin inaugure l’emploi officiel du terme, on pourrait lier ce fait à la persistance traditionnelle des liens de service personnel, plus forte dans les grandes familles originaires d’Orient, comme les Doukas ou les Comnènes. Sans doute, cette époque voit aussi la présence croissante des Occidentaux à la cour de Constantinople et l’influence des nombreux chevaliers, enrôlés selon des critères d’engagement propres à leurs habitudes, pourrait avoir joué. Cependant, l’extension de ces liens à des civils rend cette hypothèse moins vraisemblable.

 

Après le règne d’Alexis Comnène, les mentions se font plus rares, avant de redevenir plus nombreuses à l’époque de l’Empire de Nicée. Ici, la répartition de la documentation joue un rôle, puisque nous n’avons quasiment pas d’actes datant de l’époque de Jean Comnène et de son fils Manuel. Sur les sceaux de cette époque, les titulatures et notamment les fonctions sont plus rarement mentionnées, au profit des liens familiaux avec l’empereur, plus significatifs pour déterminer le profil du signataire de la bulle. Ni Tatikios, ni Jean Axouch, deux Turcs, qui l’un et l’autre avaient été élevés avec le futur souverain, ne semblent avoir été officiellement appelés hommes du basileus ; en revanche, ils entrèrent dans la parenté impériale. L’apparente résurgence au temps de Nicée pourrait s’expliquer par la situation délicate de Théodore Lascaris qui s’est appuyé sur quelques proches pour consolider son pouvoir.

 

 

52. Le commandant de la grande hétairie, Constantin, d’origine sarrasine, avait servi Monomaque avant 1042 (Skylitzès [cité n. 20], p. 438; Flusin - Cheynet (cité n. 20), p. 364).

 

 

148

 

Appendice : Les «hommes» du basileus du fonds Zacos de la BnF

 

N. Parsakoundènos, anthrôpos de notre saint empereur

 

Zacos (BnF) 129.

Dia. : 23.

Inédit.

 

 

 

 

 

Ab..., stratège et anthrôpos de notre puissant et saint empereur

 

Zacos (BnF) 3490.

Dia. : 22.

Inédit.

 

 

 

 

149

 

XIe siècle. Le sceau est d’une facture assez grossière. Il comporte de nombreuses abréviations, dont certaines inhabituelles, mais il est rédigé dans une langue grammaticalement correcte. On notera que les voyelles sont presque toutes élidées, comme dans l’écriture de l’arabe. Le nom est difficile à conjecturer. Abidélas pour Abd Allah est exclu, car la quatrième lettre du nom, mal conservée, semble être M, comparé au Μ de ἡμ(ῶν) à la quatrième ligne. Le sceau aura été probablement gravé pour un Arabe, moins vraisemblablement un Turc, peut-être à la fin du XIe siècle, au moment où les provinces byzantines d’Orient connaissent des troubles. On peut imaginer qu’il s’agit d’un notable oriental, venu prêter allégeance à Constantinople, et qui en sera reparti avec une sanction officielle de son autorité et la manifestation de son lien personnel avec le souverain.

 

 

Jean Libellisios (?), patrice, hypatos, logariaste, strateutès et anthrôpos du basileus

 

Zacos (BnF) 3607.

// Zacos (BnF) 3608.

Dia. : 28 (3607); 26 (3608).

Éd. : Zacos II, n° 517. Ch. Stavrakos suggère le nom de Libellisios (Ch. Stavrakos, Die byzantinischen Bleisiegel mit Familiennamen aus der Sammlungdes numismatischen Museums Athens, Wiesbaden 2000 [Mainzer Veröffentlichungen zur Byzantinistik, 4], n° 147).

 

Au droit, dans un cercle de grènetis, buste de saint Jean Prodrome, le visage orné d’une longue barbe finement tressée, de face, nimbé ; il bénit (?) de la droite et tient une croisette en main gauche. Epigraphe en colonne de part et d’autre :

 

 

 

 

 

150

 

XIe siècle (milieu). On notera la présence du qui remplace le autour des années 1030-1040. La combinaison de la fonction de logariaste avec celle de patrice et hypatos conduit vers les années 1060-1070, mais la proximité avec l’empereur avait peut-être valu à Jean une dignité supérieure à celle d’un logariaste (comptable) ordinaire. Le strateutès était un agent du fisc, chargé de recenser les contribuables assujettis à une strateia (obligation de service envers l’Etat). La lecture du nom final est très hypothétique. Il est au génitif et aurait dû désigner l’empereur, mais on admettra, au prix d’une rupture de construction, que le nom final était bien le patronyme de Jean.

 

 

Jean, protospathaire, épi tou koitônos, chartulaire du drome de l’Occident et anthrôpos du basileus

 

Zacos (BnF) 1805.

Dia. : 35.

Éd. : Zacos II, n° 825.

 

Au droit, dans un cercle de perles, buste très finement gravé de saint Michel nimbé, de face, imberbe, ailes éployées, revêtu des parements impériaux ; il tient en main droite un sceptre trifolié et de l’autre un globe. Épigraphe en colonne de part et d’autre:

 

 

XIe siècle (milieu). Le sceptre de l’archange est d’un type très proche de celui qu’on voit gravé sur certaines monnaies de Constantin IX Monomaque.

 

 

 

151

 

Léonce, patrice, xénodochos, anthrôpos de notre saint empereur

 

Zacos (BnF) 1785.

Dia. : 29.

Éd. : Zacos II, n° 839.

 

Au droit, buste de la Vierge, orante, avec le médaillon. À la circonférence, légende invocative:

 

 

 

 

  

Nestor, anthrôpos du prince Doukas

 

Zacos (BnF) 1911.

Dia. : 22.

Inédit.

// Musée de Iambol (plomb trouvé à Silistra) ; musée de Sofia n° 13141 (trouvé à Silistra).

Éd. des // : Jordanov, Corpus II, nos 521-522.

 

Au droit, Vierge à mi-corps, tournée vers le médaillon du Christ qui apparaît au haut du champ à gauche. A la circonférence, légende invocative, précédée d’une croisette :

 

 

Au revers, deux saints militaires en pied. Grâce aux pièces parallèles, on reconnaît saint Nestor, main droite posée sur une épée, et saint Dèmètrios. Dans le champ, à gauche, l’inscription en colonne est effacée qui, d’après les parallèles, se référait à Nestor :

 

 

 

152

 

XIe siècle, ca 1067-1071. Une variante de ce sceau a été publiée par N. Oikonomidès [53]. L’emplacement des lettres y est différent, et la Vierge figurée à l’avers est tournée vers la droite pour regarder le médaillon de l’Enfant. L’identification du personnage ne fait pas de doute, car le nom est fort rare, ce que souligne encore le choix singulier du motif iconographique, les saints Dèmètrios et Nestor. Le signataire de la bulle est sans aucun doute Nestor, d’origine illyrienne, serviteur (doulos) de Constantin Doukas selon les chroniqueurs [54]. Mais nous ne pouvons savoir si Nestor était serviteur du futur empereur, alors simple particulier, hypothèse à mes yeux la plus probable, ou bien s’il a servi Constantin quand ce dernier régnait. Un autre sceau, publié par I. Jordanov, nous informe qu’il fut, sous cet empereur, patrice et préposite [55]. I. Jordanov a longuement commenté les données connues sur Nestor. Il se rallie à la datation proposée par N. Oikonomidès, qui proposait une frappe entre 1067 et 1071, en raison de la curieuse formule désignant l’empereur par son nom transmissible. Il s’agit sans doute de Michel VII Doukas, alors coempereur pendant le règne effectif de Romain IV Diogénès. Nestor soulignait ainsi qu’il était au service exclusif de Michel, position rendue officielle par le sceau et acceptable aux yeux de Diogénès parce que Nestor avait personnellement servi Constantin, le père de Michel. Ici, c’est la loyauté envers une famille qui est soulignée. Deux des sceaux de Nestor, «homme de Doukas», ont été trouvés à Dristra/Silistra. Si la datation proposée est la bonne, c’est l’indice que Nestor entretenait des relations avec les gens de Dristra avant 1072, date à laquelle Michel VII le nomma catépan de Dristra, choix qui se comprendrait d’autant mieux que Nestor était déjà connu des habitants de cette ville.

 

 

 

53. N. Oikonomidès, A Collection of Dated Byzantine Lead Seals, Washington (DC) 1986, p. 93, n° 95 (sceaux DO 55.1.3009, DO 58.106.4713).

54. Miguel Ataliates, Historia, Introducción, edición, traducción y comentario de Im. Pérez Martin, Madrid 2002 (Nueva Roma, 15), p. 151-153; Ἡ Συνέχεια τῆς χρονογραφίας τοῦ Ἰωάννου Σκυλίτζη, éd. E. Th. Tsolakès, Thessalonique 1968, p. 166. L’origine illyrienne de Nestôr est assez énigmatique : était- il slave ? ou d’origine thessalonicienne ?

55. Jordanov, Corpus II (cité n. 4), nos 520.

 

 

153

 

Nicétas, épopte de tout l’Occident et anthrôpos du basileus

 

Zacos (BnF) 3795.

Dia. : 25.

// Musée d’Athènes; M 9098.

Éd. des II : Konstantopoulos, Βυζαντιακὰ μολυβδόβουλλα (cité n. 37), n° 335; Iz kollekcij akademika N. P. Likhaceva: Katalog vystavki, éd. V. S. Sandrovskaja, Saint-Pétersbourg 1993, n° 104.

 

Au droit, dans un cercle de perles, Vierge Hagiosôritissa nimbée, en pied, tournée de trois quarts, mains tendues vers la Manus Dei qui apparaît au haut du champ à gauche ; elle est revêtue du chitôn et du maphorion. Dans le champ, de part et d’autre de l’effigie, inscription en colonne :

 

 

XIe siècle (milieu). Le même personnage a émis un autre type de sceau très proche, qui diffère seulement par la répartition des caractères de la légende [56].

 

 

 

56. Zacos II (cité n. 4), n° 648.

 

 

154

 

Théodore, clerc impérial et ek prosôpou d’Abydos, anthrôpos du basileus

 

Zacos (BnF) 1767.

Dia. : 21.

Éd. : Zacos II, n° 728.

 

Au droit, dans un cercle de perles, buste de saint Théodore nimbé, de face, barbu, en tenue militaire, tenant une lance en main droite et de l’autre un bouclier. De part et d’autre de l’effigie, épigraphe en colonne :

 

 

XIe siècle (seconde moitié). Abydos constitue un thème depuis le début du XIe siècle. L’ek prosôpou en est le second personnage, après le stratège. Clerc, Théodore n’exerçait pas de fonction militaire. S’il est le seul «homme» du basileus de cette condition, son appartenance au clergé impérial le plaçait cependant en relation directe avec le souverain. Que des clercs aient exercé des fonctions laïques était contraire aux canons, mais assez fréquent.

 

 

 

Université Paris-Sorbonne

Institut universitaire de France

 

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